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30 juillet 2010 5 30 /07 /juillet /2010 21:57

 

Robin Cook est né et mort à Londres. Né en 1931, le 12 juin, et mort en 1994, le 30 juillet. A 63 ans, il nous avait gratifié de quelques chefs-d’œuvre et d’une œuvre particulièrement riche. Valant le détour.

 

Après avoir suivi, un peu, ce qu’un fils de bonne famille, voire de très bonne famille, doit suivre, après avoir subi l’éducation qu’un fils de bonne famille se doit de subir, il a tout plaqué. Tout laissé tombé pour suivre sa propre éducation, se la construire… Tout en reniant, remettant sérieusement en cause, la classe dont il était issu.

Après les Etats-Unis, l’Espagne, la pègre (je crois qu’on l’appelait comme ça à l’époque) d’Angleterre, il se lança, se lâcha dans l’écriture.

 

Numériser0001Son premier roman, Crème anglaise (The crust on its uppers) sortit en 1962 au Royaume-Uni puis en 1966 en France dans la Série Noire. Comme beaucoup des livres édités à l’époque par la collection dirigée par monsieur Duhamel, il fut quelque peu malmené, un chapitre entier fut supprimé, il fallait que ça tienne dans le format de la collection, que ça ne dépasse pas le nombre de pages préconisé, environ 180. C’est toujours dans cette traduction qu’il est accessible en français.

Robin Cook y règle ses comptes avec ses origines, y parle un peu de ce qu’il a vécu, du milieu de la délinquance qu’il a côtoyé avant de s’exiler en Italie pendant le reste des années 60. Pour plus de détails sur l’intrigue, sur mon avis, reportez-vous à la chronique que j’ai commise sur Pol’Art Noir à propos de ce bouquin.

Une entrée en écriture qui connait un certain succès, au moins un succès d’estime. Il intéressa également par la langue employée (que la traduction française ne respecte pas forcément, la difficulté a été contournée en allant au plus simple, une utilisation de l’argot en vogue alors dans les publications de la série noire faisant l’affaire, d’après Marcel Duhamel lui-même, éditeur et traducteur pour l’occasion).

Cette réussite, ce premier essai plein de promesse ne fut pas suivi de résultat. Il continua à écrire sans susciter le même intérêt. Pourtant, les romans suivants ne furent pas des romans dénués d’intérêt ou de talent. Robin Cook s’attela à dénoncer ce que la société anglaise avait de plus décadent, de moins reluisant.

 

Bombe surpriseLe deuxième roman, Bombe surprise, publié sous ce titre outre-Manche également, vit le jour en 1963 en Angleterre et en 1993 en France. Une traduction tardive qui montre le désintérêt qu’ont procuré les ouvrages suivants de Cook. Sans succès au Royaume-Uni, donc non traduits chez nous.

Bombe surprise s’attaque pourtant à un sujet épineux, à cette époque, en Angleterre, la montée du National Front. Cette montée s’annonce et Robin Cook la montre du doigt en profitant pour dénoncer, décrire, ce que sont véritablement ses concitoyens à cette époque… pas tous mais certains d’entre eux. J’en ai également parlé sur le site Pol’Art Noir.

Le ton est léger pour un sujet grave. Et pour un effet inconfortable, sourire sur un thème assez nauséabond, c’est déstabilisant pour le lecteur aussi. Et sourire sur un sujet nauséabond qui les concernait au premier chef n’a pas dû enthousiasmer ses contemporains, les sujets de sa très gracieuse majesté.

 

Le troisième roman qu’il publie en 1966 n’est toujours pas traduit en français. La traduction est en cours, Jean-Paul Gratias s’y est attelé mais ça n’est pas la priorité de son éditeur, les éditions Rivages. Il faudra être patient pour lire dans la langue de Molière, The legacy of the stiff upper lip.

 

Vices privés, vertus publiquesPour son quatrième roman, Robin Cook continue à titiller là où ça fait mal. Après la montée de l’extrême-droite, il évoque la décadence de la noblesse (il y revient) et comment elle s’acoquine parfois avec les malfrats pour survivre. Avec une certaine délinquance, celle de la prostitution… C’est Vices privés, vertus publiques (Public parts & private places), publié en 1967 de l’autre côté du Channel et en 1990 de ce côté-ci.

Il nous livre-là un roman dont il reprendra le thème quelques années plus tard, et même certains personnages. Il en reprendra le thème en l’approfondissant, en le rendant plus noir encore, ce sera La rue obscène.

Voilà ce que j’en ai notamment dit ailleurs :

« C’est un roman étrange qui nous est livré, difficile à définir. S’il est noir, il n’en a pas l’aspect de prime abord. C’est un roman blême que l’on lit. De ce blême des fins de nuit où l’on a refait le monde et où sa triste réalité, son immuable décrépitude, vous claque au visage. De ce blême qui envahit les visages avant que la rage contenue n’éclate. »

Dans ce roman, Cook regarde l’histoire du côté de ces aristos déchus sur lesquels ils se sera si souvent attardé.

 

Quelque chose de pourri au Royaume d'AngleterreSon cinquième roman est, pour moi, le plus fort, le plus marquant de sa première période. L’un de ses chefs-d’œuvre. Quelque chose de pourri au Royaume d’Angleterre, 2003 (A state of Denmark, 1970). Un roman d’une noirceur profonde au style particulièrement touchant. Poétique par endroit. Une poésie sombre, très sombre.

Il s’y met en scène. Même si ce n’est pas clairement dit, il s’agit bien d’un de ses alter ego. Il y en a eu d’autres dans les romans précédents mais ils étaient en lisières, là il est au centre. C’est le narrateur de l’histoire. Le narrateur et celui qui va subir une lente déchéance, ne parvenant pas à renoncer à son pays.

Robin Cook s’aventure dans une uchronie où l’Angleterre est tombée sous le joug d’un fasciste s’étant donné au départ l’apparence d’un homme de gauche bon teint. L’Angleterre a sombré et le héro l’a fui.

J’en ai parlé aussi sur le site Pol’Art Noir, allez-y voir ! Rien à ajouter sinon que c’est pour moi l’un de ses grands romans. L’un des grands romans, tout auteur confondu, qu’il m’ait été donné de lire.

 

La rue obscèneLa première période de Robin Cook s’achève avec La rue obscène (The Tenants of Dirt Street) que j’ai déjà évoqué plus haut. Publié en 1971 au Royaume-Uni et en 1992 ici, profitant du retour en grâce de son auteur pour paraître en France.

Cette première période s’achève sur un très bon roman, un roman qui reprend le thème de la délinquance liée à la prostitution et de ses accointances avec la noblesse, une certaine frange de celle-ci.

Coome je l’ai écrit ici, on retrouve certains de ceux que nous avions croisés dans Vices privés, vertus publiques et, le moins que l’on puisse dire est que les choses ne changent pas, ou si peu, dans le secteur de l’exploitation de la perversion.

Avec ce roman important, un roman majeur, Robin Cook se retire du monde de la littérature. Il ne publiera plus avant onze ans… Il se retire de ce monde qui ne lui a pas permis de vivre, d’en vivre.

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