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20 juin 2012 3 20 /06 /juin /2012 16:40

Deux ans après Le grillon enragé, Amila amène dans son univers un héro qui deviendra récurrent, Edouard “Doudou” Magne, alias Géronimo. Ce flic à l’allure pas vraiment classique apparaît dans La nef des dingues (référence à Jérôme Bosch et sa nef des fous ?).

Nous sommes en 1972 et l’accoutrement des jeunes n’est plus tout à fait dans la droite lignée des ainés. La mode est à la peau de mouton, aux cheveux longs… Et, comme pour valider cette tendance, Amila invente ce flic ayant adopté cette nouvelle ligne vestimentaire. Un flic aux idées non-violentes… dans certaines limites.

Nous ne croisons pas tout de suite l’officier de police Magne, l’histoire commence avec un couple se voulant bohème. La nef des dingues (1972)Dorf, peintre tirant le diable par la queue et vivant au crochet de Brigitte, dite Bri. Ces deux-là ne savent plus trop où ils en sont, hippies dont les convictions non-violentes et anti-bourgeoises sont mises à mal. Ils nous entraînent dans un périple jalonné de personnages sur le fil, comme eux. Il y a Meyer, promoteur immobilier en passe de tomber pour un délit d’initié et aux convictions bibliques presque intégristes, sa compagne, Solange, amie de Bri. Il y aura aussi Bob et Pipou, deux jeunes sans foi ni loi, et certains services de l’Etat, plus ou moins secrets, aux méthodes radicales.

Doudou Magne est appelé à la rescousse par Bri et va se naviguer en eaux troubles, parmi ces personnages peu recommandables, au final. Naviguer et essayer de ne pas perdre le fil…

Amila dézingue la société de son époque, une révolution qui aura fait long feu chez certains, des magouilles, une jeunesse à l’abandon et des barbouzes, cousins lointains de ceux croisés dans Le grillon enragé. Quand je dis qu’il dézingue joyeusement, ce n’est pas qu’une façon de parler puisque ça tombe comme à gravelotte et que nous assistons à tout ça en se demandant si ça s’arrêtera.

C’est un Amila désabusé et léger que l’on lit avec curiosité et dont le personnage de flic intrigue, coincé entre ses convictions et son métier et sous les ordres du commissaire Verdier déjà croisé avec Lentraille et que nous retrouverons de nouveau… Amila commence à exploiter l’univers qu’il s’est créé au fil des romans et nous accueille désormais dans celui-ci. Nous le retrouvons avec intérêt. Les bateaux (cette fameuse “nef” du titre), les compromissions et une absence de morale de plus en plus criante…

C’est un roman plus léger que les précédents, plus à l’emporte-pièce, partant dans tous les sens. Peut-être écrit plus vite… Une nouvelle ligne narrative qui déstabilise et se perd peut-être parfois. Se perd pour finalement se resserrer au moment du dénouement final et nous faire retrouver un sens au bazar ambiant…

 

Quelques mois plus tard, Doudou Magne reprend du service. L’officier de police revisite une affaire qui a fait grand bruit deux décennies plus tôt, l’affaire Dominici. En effet, dans Contest-flic, Amila se penche de nouveau sur ce fait divers qu’il avait déjà abordé dans La tragédie de Lurs, l’un de ses derniers bouquins signés Meckert.

J’en ai déjà parlé ailleurs, voici ce que j’en disais :

Jean Amila s'attaque à l'affaire Dominici. Et comme on pouvait s'y attendre, ça ne ressemble absolument pas à ce que l'on pourrait attendre.

Une famille allemande est sauvagement assassinée à proximité de la Grange-Rouge dans les Basses-Alpes et tout Contest-flic (1972)naturellement, les soupçons se portent sur les occupants de cette ferme isolée. La presse s'empare du sujet, l'affaire se répand, occupe le devant de la scène en ce mois d'août... Géronimo, surnom donné à l'O.P. Edouard Magne à cause de ses longs cheveux et de sa tenue vestimentaire, est envoyé là-bas, sur ses congés et non officiellement, pour appuyer la thèse de son chef, le commissaire Verdier.

Il va s'intéresser à certains témoignages laissant penser que l'affaire n'est pas aussi simple qu'elle y parait. Cela va l'amener à croiser les services secrets, le grand banditisme... et une jeune journaliste teutonne sans scrupule, chasseuse de scoops.

Jean Amila n'est tendre avec personne. Les policiers, les journalistes, les services secrets et les collusions qui les unissent en prennent pour leur grade. Il prend plaisir à greffer sur ce sujet sérieux une aventure au ton rocambolesque.

Jean Amila nous offre là un bon moment de lecture, un vrai plaisir comme on en a à chaque fois que l'on ouvre l'un de ses romans !

Avec ce deuxième opus des aventures de l’OP Géronimo, Amila semble avoir adopté une démarche identique au premier. Une intrigue qui pourrait être sérieuse et qui prend un ton léger pour en dénoncer le plus possible. Les années soixante-dix n’ont décidément rien d’idylliques sous la plume du romancier… Il a toutefois donné un ton quelque peu journaliste à la narration avant de se laisser aller à une intrigue plus improbable. Plus extravagante.

 

Deux ans plus tard, la suite des aventures de Géronimo arrive. Il s’agit de Terminus Iéna. Ce troisième et dernier volet des enquêtes de l’O.P. Edouard Magne confirme une tendance entrevue lors des deux précédents, une tendance lorgnant parfois, de manière surprenante, du côté du grand guignol.

Après une référence à la peinture puis à l’un de ces faits divers marquant épisodiquement notre société, Amila va voir du côté du cinéma et de la littérature. Le terminus évoqué ici doit son nom à la bataille napoléonienne et au traitement que lui a fait subir Balzac dans Une ténébreuse affaire. Le roman du grand Honoré est en cours d’adaptation Terminus Iéna (1973)cinématographique et c’est au milieu du tournage que débarque Doudou Magne pour interroger un acteur de second rôle, de seconde zone, sur la disparition de sa femme… Acteur que l’officier de police avait d’abord cru mort noyé après la découverte d’un corps lui ressemblant quelque peu et la déclaration de son épouse le croyant disparu mais se refusant à le reconnaître dans ce cadavre. Jusqu’ici, tout est simple. Ou presque. Mais les choses vont se compliquer. Le film en cours est une coproduction franco-est-allemande et elle intéresse pas mal de personnes… à commencer par ces fameux services secrets qu’Amila poursuit depuis quelques bouquins déjà, depuis Les fous de Hong-Kong pour être exact. C’est une obsession commune au romancier et à son personnage récurrent. Alors que l’intrigue suit son cours, multipliant les individus louches, elle emprunte un chemin étonnant… Nous sommes tout à coup bringuebalés entre le passé et le présent, aux prises avec des personnages ne sachant plus s’ils sont encore dans les années soixante-dix ou l’année 1806, date de la fameuse bataille…

A noter, de manière anecdotique, que le roman marque le retour de Mad, l’amie de Géronimo, l’un des personnages de La nef des fous que le policier hippie avait délaissée lors de son enquête dans les Basses-Alpes.

Comme pour les deux opus précédents, on a parfois l’impression de sauter du coq à l’âne et de ne pas bien comprendre la progression de l’histoire. Impression que l’écrivain hésite entre deux façons d’aborder l’intrigue, deux façons de nous narrer les rebondissements qui lorgnent du côté de Ponson du Terrail ou de ce que l’on en imagine. C’est surprenant, déstabilisant. Perturbant.

Ça n’est, au final, pas déplaisant.

 

Avec cette “trilogie”, Amila a enfoncé le clou de sa vision peu reluisante de cette police parallèle que sont les services secrets. Il a privilégié des intrigues à rebondissements au détriment des personnages sur lesquels il se centrait jusque là pour étayer son propos. C’est plus ou moins réussi, pas désagréable. Curieux…

Une parenthèse ?

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