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15 janvier 2012 7 15 /01 /janvier /2012 14:27

En 1959, Jean Amila apparaît, avec ce nouveau prénom, laissant tomber l’anglo-saxon si éloigné de son univers. Il apparaît sur la couverture de Les loups dans la bergerie.

Avec ce roman, il affirme une nouvelle fois ses préoccupations, son style et un certain point de vue.

Et justement, avec ces loups, se confirme l’une des constantes de l’auteur. Une constante qui, pour moi, le rend si particulier. Cette constante est la place faite aux femmes dans ses intrigues. Dans Les loups, le personnage central en est, de mon point de vue, Irène, jeune fille pleine d’idéaux qui vont devoir affronter la réalité. Elle en est le personnage Les loups dans la bergerie (01-1959)central ou au moins l’un d’entre eux, au même titre que les deux sœurs Amy et Jane de Y’a pas de bon Dieu !, que Jacqueline dans Motus !, que Maine et Thérèse dans La bonne tisane ou encore Colette avec Sans attendre Godot. Cette importance des femmes dans l’œuvre d’Amila va se confirmer de livre en livre.

Dans Les loups dans la bergerie, Irène est présente du début à la fin. Elle est d’abord surprise en pleine préparation de l’accueil d’enfants à la bergerie. Une bergerie abandonnée puis retapée pour des jeunes déjà délinquants, déjà repérés par la justice, et que Irène et son compagnon veulent prendre en main, loin de la ville, pour leur offrir une possibilité de changer, de ne pas suivre l’avenir que la société, la bonne, la bien pensante, leur prédit. Ils sont pleins d’idéaux mais on ne saura jamais si ils nageaient en pleine utopie ou non car, avant même que les adolescents ne soient là, trois personnages font irruption. Trois délinquants, des vrais, des durs, des voyous en fuite, évadés de prison. Ils cherchent un endroit où se cacher en attendant que les choses se tassent et croient avoir déniché le coin idéal, paumé, loin de tout, avec cette bergerie.

Nous assistons à une cohabitation tendue. Le couple voulant épargner les adolescents essaie de composer avec des malfrats préoccupés par leur survie… Rien ne se passera comme tous l’espèrent, mais en fait, aucun n’espère la même chose…

Jean Amila nous offre un affrontement presque à huis-clos, au milieu d’une campagne désertée et où les sentiments vont s’exacerber, la chaleur amplifiant les réactions. C’est un roman intéressant, moins ancré que les précédents dans une mode du moment, Amila s’affranchit des figures imposées de la collection dans laquelle il sévit pour s’intéresser plus à une société qui provoque des conflits parmi les gens simples, ceux qui n’ont pas d’ambition démesurées… Il y a peut-être dans ce roman un peu plus de l’auteur d’avant, de celui qui s’appelait Meckert et qui commettait, par exemple, Les coups.

 

La même année, à peine quelques mois plus tard, paraît le deuxième roman signé Jean Amila, le sixième si l’on oublie le prénom. Le drakkar est un roman de bord de mer. Un roman plus calme que le précédent mais où les luttes n’en sont pas moins violentes, juste plus feutrées, plus insidieuses.

Nous sommes, comme pour Motus !, au bord de l’eau. Une eau salée, cette fois. L’histoire bénéficie de deux points de vue ; en effet, à l’approche d’un procès, la patron d’un journal envoie deux hommes enquêter sur l’affaire qui y a mené, un journaliste et un romancier. Le journaliste narre l’enquête au jour le jour quand le romancier reprend l’histoire Le drakkar (04-1959)depuis le début et offre à la lecture son manuscrit en pleine progression. Les deux points de vue vont s’affronter, le journaliste ne voulant voir qu’une sombre intrigue de bandits alors que le romancier s’intéresse à toutes les personnes concernées, tachant de leur redonner une place dans le fil des événements. Fil des événements qui a conduit au meurtre d’une femme, une riche américaine dépensant son argent sur la côte bretonne, allant jusqu’à accepter de construire un drakkar, en plus petit, à l’image de celui d’Erik le Rouge pour que son jeune amant puisse rejouer la première découverte de l’Amérique. Des malfrats sont mêlés à l’histoire, lorgnant sur le restaurant de la rentière laissé à la gestion d’un couple pas vraiment sympathique.

Le journaliste ne voulant que traiter le côté fait divers et l’évidente culpabilité du milieu va petit à petit se rendre au point de vue du romancier y voyant une histoire plus compliquée, pas aussi simple que la justice l’a cru.

Jean Amila nous raconte l’histoire sous deux angles, le journaliste pas forcément à son avantage, va en apprendre du romancier, plus fin dans sa perception des humains… Je ne sais pas si il a cherché à régler des comptes mais Amila s’amuse à montrer certains égarements, il semble moins porter d’attention à une intrigue bizarre, peut-être un peu légère et particulièrement marquée par une époque… C’est un roman intéressant quand on s’intéresse à l’auteur, mais je ne suis pas sûr qu’il soit d’un grand intérêt pour un lecteur cherchant un roman réussi. C’est un roman qui semble dénoter dans l’œuvre d’Amila. Même si une fois encore, une femme, assassinée, et une autre, disparue, en sont le centre.

 

Les années 50 s’achèvent pour notre auteur sur ces deux romans étrangement dissemblables. Le style reste là mais Amila paraît toujours à la recherche d’un univers, univers qu’il a pourtant semblé toucher du doigt avec Les loups dans la bergerie… Il va continuer, dans les années 60, à évoluer, à construire une œuvre qui est une œuvre majeure dans le roman noir, une œuvre à explorer, avec ses hauts et ses bas.

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commentaires

H
La part belle aux femmes? Eh bien, cet auteur mérite d'être lu, assurément!
Répondre
J
<br /> <br /> Cela ajoute un intérêt à cet auteur qu'il faut lire de toute façon.<br /> <br /> <br /> C'était un révolté qui parlait des petits, des sans-grades, de ceux qui étaient broyés, niés, par la société... les femmes ne sont malheureusement pas les dernières dans cette situation.<br /> <br /> <br /> <br />

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